Le 23 décembre 2021, Cathy Apourceau-Poly a adressé au Ministère de l’économie une question écrite sur la modification de calcul de l’assiette du Fonds de Compensation de la Taxe sur la Valeur Ajoutée.
Le 14 avril 2022, une réponse provenant du Ministère a été publiée au Journal Officiel. Par cette réponse, et au-delà des précisions comptables de la réforme, le Ministère précise bien que rendre éligible les travaux en régie et une part du numérique au FCTVA coûterait trop cher à l’État.
L’article 251 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 met en œuvre l’automatisation de la gestion du fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA) pour les dépenses exécutées à compter du 1er janvier 2021.
Cette réforme entre en vigueur à compter du 1er janvier 2021 pour le régime N, qui correspond au versement des attributions de FCTVA la même année que la réalisation des dépenses d’investissement éligibles constatées, puis respectivement en 2022 et 2023 pour les régimes N-1 et N-2.
Elle consiste à remplacer une procédure « manuelle », dans le cadre de laquelle les collectivités devaient procéder à la déclaration de leurs dépenses d’investissement pour bénéficier d’une attribution du FCTVA, par un système fondé sur l’imputation régulière dans les comptes d’une collectivité d’une dépense d’investissement lui permettant de percevoir automatiquement le FCTVA auquel elle a droit. Cette réforme est attendue, à plusieurs titres, par les collectivités : d’une part, les attributions de FCTVA se feront plus rapidement ; d’autre part, l’automatisation de la gestion du FCTVA conduit à un allègement des tâches réalisées par les services des collectivités. Enfin, les cas de non-recours dus à l’actuelle procédure « manuelle », qui concernaient principalement les plus petites collectivités, seront supprimés.
L’automatisation a conduit à revoir la définition de l’assiette des dépenses d’investissement éligibles. Dans le système déclaratif, l’assiette était fixée par voie réglementaire. Avec cette réforme, l’éligibilité des dépenses se constate lorsqu’elles sont imputées régulièrement sur un compte éligible, dont la liste est fixée par l’arrêté interministériel du 30 décembre 2020. Le Gouvernement s’est attaché à ce que le périmètre des dépenses éligibles ne soit modifié qu’à la marge. Pour autant, le plan comptable des collectivités ne correspondant pas exactement à l’ensemble des items qui composent l’assiette réglementaire, des ajustements ont dû être opérés dans un objectif de neutralité financière de la réforme.
Ainsi, le compte 2051 « Concessions et droits similaires » n’a pas été retenu dans l’assiette d’éligibilité car il n’est pas possible d’y distinguer les dépenses de logiciels anciennement éligibles au FCTVA des dépenses inéligibles. Toutefois, certaines dépenses liées au numérique restent éligibles au FCTVA avec la réforme, lorsqu’elles correspondent à des dépenses d’informatique en nuage régulièrement imputées sur les comptes 6512 ou 65811. Par ailleurs, les dépenses liées aux travaux en régie n’ont pas été retenues dans le périmètre d’éligibilité car l’écriture d’ordre permettant d’intégrer des dépenses de fonctionnement en investissement ne permet pas de distinguer les seules dépenses de personnel non éligibles au FCTVA. Néanmoins, l’éligibilité au FCTVA des dépenses d’acquisition de matériels utilisés pour des immobilisations inscrites directement sur des comptes éligibles en section d’investissement est maintenue. Conformément à l’article L. 132-16 du code de l’urbanisme, les dépenses relatives aux documents d’urbanisme et à la numérisation du cadastre vont bien continuer à bénéficier des attributions de FCTVA. En effet, la loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021 a conduit à maintenir le compte 202 « Frais liés à la réalisation des documents d’urbanisme et à la numérisation du cadastre » au sein de l’assiette automatisée.
Le FCTVA constitue par principe un soutien global de l’État en faveur de l’investissement local et ne peut être assimilé à une subvention ou un concours attribué spécifiquement pour un projet donné. L’attribution du FCTVA dépend de la législation applicable au moment de l’attribution. En effet, conformément à l’arrêt Fourcade rendu par le Conseil d’État le 9 novembre 1988, le fait générateur n’est pas constitué par la réalisation de la dépense éligible mais bien par la liquidation du fonds, qui intervient deux ans après dans le régime de droit commun (un an dans le régime dérogatoire). Il n’y a pas de droit acquis au FCTVA pour les collectivités ayant engagé des dépenses avant la réforme, qui deviennent inéligibles dans le nouveau cadre automatisé.
Ainsi, les mesures d’exclusion des dépenses de travaux en régie et de logiciels sont à mettre en perspective avec des mesures d’extension d’assiette. Entre autres, les dispositions des articles L. 1615-7 et L. 1615-10 du CGCT (code général des collectivités territoriales) ne s’appliquent plus pour les dépenses exécutées à compter de l’exercice 2021. Les dépenses relatives à des biens mis à disposition de tiers inéligibles sont donc éligibles, quand elles sont imputées sur un compte éligible. De même, les subventions de l’État attribuées aux collectivités ne sont dorénavant plus exclues de l’assiette qu’elles soient ou non calculées sur une base TTC. Par conséquent, à l’échelle de tel ou tel projet l’évolution des règles d’attribution du FCTVA peut conduire à une évolution favorable ou défavorable du montant de FCTVA attendu. L’effet de la réforme pour une collectivité doit donc être apprécié sur le montant total de FCTVA perçu par la collectivité et rapporté notamment à l’évolution de son effort d’investissement. Or, les simulations réalisées en amont de la réforme ont conduit à montrer que celle-ci génère un coût supplémentaire pour l’État et s’avère par conséquent globalement favorable aux collectivités, notamment en supprimant le non-recours au FCTVA pour plusieurs collectivités. Elle permet aussi de simplifier la gestion du FCTVA en supprimant la quasi-totalité des obligations déclaratives. L’inclusion des dépenses de travaux en régie et de logiciels conduirait à augmenter fortement le montant global du FCTVA, tout en fragilisant le bon déploiement de la réforme. Il n’est donc pas envisagé de réintégrer ces dépenses dans l’assiette d’éligibilité.